Corrigé : Le portrait

Le sujet invite à nous concentrer sur l’essence du portrait, i.e. à répondre aux questions qu’est-ce? et pourquoi?, ce qui revient grosso modo au même. Le portrait, c’est la représentation d’un visage. La première question est donc: pourquoi le visage?

Et nous retombons sur une analyse du type Lévinas ou Finkielkraut. Restons sur ce dernier.

Le visage est probablement la partie d’autrui la plus insaisissable, tout simplement parce qu’il est en perpétuel changement, selon les sentiments éprouvés ou même, de manière beaucoup plus simple, le temps. D’où la nécessité de fixer le visage, de se l’approprier.

Le portrait est donc en fait le moyen de détouner la relation à autrui. Par l’utilisation d’un média, pictural ou écrit.

Mais que fixe le portrait? Assurément, ce n’est pas ce visage précisément, c’est ce visage vu, donc déjà médiatisé, par le peintre. Dorian Gray est peint pur, éternellement jeune, Bertin (Ingres) à la manière d’un rapace, calculateur, dominateur, puissant.

Les deux sont des sortes d’allégories. D’où une première caractéristique du portrait: il est réducteur. Pour faire plus simple, le portrait est en fait le représentation du REGARD de l’auteur, non de celui qui pose: ” L’art est en réalité non le miroir de la vie mais du spectateur.” (Wilde Le portrait de Dorian Gray, préface)

Le portrait est donc conflit entre l’objet vu qui s’attache à demeure sujet et l’auteur, autre sujet qui s’attache, lui, à objectiver le premier. Pour le dire mieux, le portrait est une réduction exacte de la relation traditionnelle qui s’instaure entre 2 sujets (voir à ce sujet toute la thése du regard chez Sartre, l’Etre et le Néant).

L’autre conflit au sein du portrait est entre l’apparence du personnage et le personnage représenté. Il ne recrée pas, il récrée, divertit, détourneIci, la question n’est plus comment le portrait représente mais que représente-t- il?

Je propose l’argumentation d’Oscar Wilde, peut-être un peu marginale. Le portrait n’est que pure apparence. Il ne vise qu’à la beauté extérieure. Partant, nous ne devrions pas chercher à l’analyser:

L’art est à la fois surface et symbole.

Ceux qui vont au-dessous de la surface le font à leurs risques et périls.

Ceux qui interprètent le symbole le font à leurs risques et périls. (ibid.)

En d’autres termes, le portrait ne ment pas, il révèle l’essence, presque immédiatement, du perso représenté. Lorsqu’ainsi le peintre de Dorian voit son portrait défiguré, il voit, et comprend, immédiatement la nature de Dorian. Il en mourra.

Le portrait est donc le seul langage parfaitement adapté à la communication d’une information sur l’humain, car il est à la fois surface et symbole, signifiant et signifié.

Par conséquent, le portrait remplit son rôle de possession: il nomme,donc il s’approprie.

Enfin, une troisième partie assez classique: le portrait permet au visage humain, donc à l’homme, d’échapper au temps, à la mort. Là encore, Dorian meurt, défiguré par le vice et la vieillesse mais son portrait lui survit, éternellement jeune et beau.

D’où un plan:

1)L’enfer, c’est le portrait

2)Le portrait, langage de l’humain

3)Le portrait, divertissement (au sens pascalien)

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