Pétrodollars, Scheiks, argent sale, flambée des prix, corruption, cartels… Le pétrole fait toujours autant parler de lui, d’autant plus avec la montée des prix constatée depuis l’émergence de la Chine et de l’Inde ces dernières années. S’il s’agit d’un secteur complexe et difficile à résumer, il attire néanmoins les étudiants et business men en herbe.

Le monde du pétrole est-il aussi obscur qu’il en a l’air ? Pourquoi tous les pays cherchent-ils à profiter de la manne pétrolière ?

La France s’est bien immiscée dans ce secteur, alors si l’on a pas de pétrole en France, on a sûrement eu des idées…

Production et producteurs

Du latin petraoleum signifiant littéralement « huile de pierre », le pétrole est exploité principalement dans quelques grandes régions que sont le Golfe Persique, la Sibérie Occidentale, le Golfe du Mexique, la Mer du Nord et le Golfe du Niger. La production mondiale actuelle avoisine les 85 millions de barils par jour, dont 25 millions par l’OPEP. Mais attention, qui dit « producteur » ne dit pas forcément « exportateur ». Certes, l’Arabie Saoudite arrive en tête des deux classements producteurs-exportateurs. Or, contre exemple, le Kenya exploite de plus en plus ses réserves tandis qu’il peine à exporter sa production, ses exportations restant très limitées et sporadiques.

Détermination des prix

Si le cours du brut a atteint des prix élevés et instables tournant autour de $74 le baril, la Banque Mondiale prévoit cependant une stabilisation des prix à $40 à partir de 2010. En continuant sur les chiffres, il est bon de rappeler qu’en 1998, le baril s’échangeait à $12. Tout un fossé…

Ce qui détermine en premier lieu le prix d’un type de pétrole par rapport à un autre, c’est sa qualité. Plus il est léger et sulfureux, plus il est cher, car moins il demande de traitement avant d’être commercialisé définitivement. C’est le cas du Brut Nigérian, Irakien, Saoudien ou de la Mer du Nord, à la différence des Bruts en provenance du Mexique ou du Canada.

A cela se rajoutent d’autres facteurs externes et pour le moins conséquents qui perturbent la production. Tout d’abord, la situation géopolitique comme on a pu le voir au Moyen Orient avec l’Irak ou l’Iran. Ce qui rappelle au passage les origines des chocs pétroliers des années 1970. D’autre part, le contexte politique intérieur influe aussi, cf la crise politique qu’a traversée le Venezuela en 2002 avec le face à face entre Hugo Chavez et la société Petroleos de Venezuela , et qui a fait chuter les exportations du pays de 80% pendant la grève des ouvriers de Petroleos !

Autre facteur important : les conditions climatiques. Par exemple, la saison des ouragans et les changements de températures sont pris en compte dans les contrats futurs élaborés par les traders. Les ouragans Rita et Katrina ont notamment fait flamber les prix au Canada (pénuries sur l’Est du continent, anticipations autoréalisatrices de la pénurie et donc poussées inflationnistes).

L’OPEP fixe par ailleurs le montant des réserves exploitables, et influe donc sur le prix par la simple loi de l’offre et de la demande. En outre, la demande est un facteur qui évolue en fonction des besoins mondiaux, notamment des grands pays émergents (Chine et Inde), d’où encore une fois une pression à la hausse des prix ces dernières années.

Ces facteurs étant cités, ils n’expliquent pourtant pas entièrement la flambée des prix. Il est possible de pointer du doigt les comportements spéculatifs des fonds de pension par exemple. Les matières premières subissent un vrai effet de mode dernièrement ; selon Deloitte & Touche la loi de l’offre et la demande peut expliquer $50, et les incertitudes géopolitiques en Iran, Venezuela et Nigéria $10. Le reste serait de l’exagération à la hausse des acteurs financiers.

Enfin, le commerce du Brut se fait principalement sur les places financières que sont le NYMEX (New York Mercantile Exchange) et l’IPE (International Petroleum Exchange). On peut aussi retrouver les prix sur les PLATTS avec les prix CIF et FOB des cargaisons à la tonne de pétrole selon leur type (Crude, LPG, Jet, Gasoil, Fuel etc).

Pour finir, il convient de rappeler l’équivalent sur lequel les compagnies pétrolières travaillent, à savoir 1 tonne métrique = 7,199 barils de brut. Ensuite la prime par baril demandée par les producteurs et intermédiaires pour une opération tourne entre $2 et $3. D’où un marché très lucratif et donc forcément sous le feu des projecteurs…

L’Afrique, un nouvel eldorado ?

Si le Moyen Orient conserve un poids prépondérant du fait qu’il concentre 60% des réserves mondiales, il est intéressant de soulever le rôle grandissant que pourrait jouer l’Afrique dans les échanges futurs. En effet, mise à part la corne du Niger, le reste du continent manque de maturité et de savoir-faire. Le Congo Brazzaville, le Kenya et même le Soudan peuvent devenir des acteurs de poids du continent s’ils arrivent à surmonter leurs problèmes techniques ou de corruption. Ainsi, le Congo Brazzaville est encore miné par des pratiques népotistes ce qui repoussent les investisseurs étrangers, cf l’audit particulièrement critique réalisé par KPMG à la SNPC (Société nationale des pétroles congolais, première raffinerie du pays).

Mais les réserves sont là, tout comme les perspectives de développement. Si l’Afrique ne tombe pas dans le syndrome hollandais , alors elle pourra devenir une région à part entière dans les échanges pétroliers. En outre, les pays importateurs de pétrole pourraient bien voir en l’Afrique la solution pour limiter leur dépendance vis-à-vis des exportateurs du Moyen Orient.

Une des conclusions intéressantes que l’on peut tirer pour les chers étudiants français est que finalement l’arabe ne sera peut être pas la langue officielle du commerce du pétrole. Déjà, l’anglais prédomine au Moyen Orient dans les échanges de l’or noir. Mais si l’Afrique s’affirme avec autant de puissance, alors on pourrait assister à un regain d’intérêt pour la langue de Molière.

Pic de production et fin du pétrole ?

La fin du pétrole, personne ne la connaît vraiment. Le discours des Cassandres a été maintes fois répété. Selon BP Statistical Review, il resterait 1200 milliards de barils de brut conventionnel à extraire, ce qui laisserait une quarantaine d’années de consommation.

Quant au pic de production mondial, le Club de Rome en 1973 prédisait déjà qu’il aurait lieu en 1985. Maintenant, l’ASPO (Association for the study of Peak Oil and Gas) pense qu’elle aura lieu entre 2010 et 2020 ; et l’USGS (United Sates Geological Survey) le prévoit pour 2028. Dans les deux derniers cas, la production quotidienne irait de 100 à 150 millions de barils. Autant dire qu’il y a de la marge dans les prévisions…

Il est toutefois bien difficile de pronostiquer la fin du pétrole ou l’arrivée du pic de production pour une raison simple : la demande mondiale est encore difficile à prévoir. Le développement économique de la Chine et de l’Inde – principaux responsables de la montée des prix – est encore trop difficile à évaluer pour quantifier avec une précision absolue la demande mondiale future.

Grandes écoles et métiers du pétrole

Les métiers du pétrole sont très divers étant donné le nombre d’étapes par lesquelles passe l’or noir avant d’arriver dans les mains d’un consommateur. De l’extraction à la vente au consommateur, en passant par le trading et la logistique, l’étudiant de grande école peut investir différentes niches. Les stages proposés par les majors sont néanmoins peu rémunérés. Ils peuvent par contre offrir des opportunités de progression dans l’entreprise. Si les grands groupes sont peut-être positifs pour votre CV, intégrer une structure d’experts et impliquée dans plusieurs gros projets est certainement plus enrichissant et plus passionnant.

Notes
Futures : Un contrat future est un accord au temps t0 sur un prix qui sera valable jusqu’au temps t1, c’est une sorte de pari sur l’évolution du prix de l’objet du contrat. La valeur stochastique s’échange donc contre une valeur fixée.
Les anticipations autoréalisatrices entraînent des phénomènes de spéculations à la baisse ou à la hausse, d’où parfois des phénomènes de bulles spéculatives. Les consommateurs nord-américains ont senti venir la pénurie et ont donc consommé pour se parer contre la pénurie. Résultat : la pénurie a bien lieu, s’aggrave, et les cours flambent.
Over the counter. Marché sans frontières physiques.
CIF : Cost, insurance and freight ; FOB: Free on Board, Franco à bord.

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